Carnets de Gaza-Palestine – mai 2012 :
Je suis rentré dans sa maison, ils nous avaient accueillis comme, ici, on sait accueillir les étrangers. Il était heureux de nous voir.
La journée, il travaillait et la nuit, parfois, il montait la garde sur la ligne de front, arme à la main. Il souriait quand il me racontait. Pas de haine, pas de colère, simplement sa vie.
Lors de la dernière agression un obus avait explosé tout près de lui. Toujours en souriant, il me racontait qu’il avait volé dans les airs. Il s’en est tiré avec une grave blessure au dos mais cela ne l’empêchait pas de continuer à participer à la résistance. Pas de ressentiment, pas de désir de vengeance, simplement sa vie.
Il avait vingt cinq ans, il en paraissait bien plus. Ses yeux brillaient de bonheur, son visage était lumineux quand il souriait. Il me dit alors qu’il avait cinq enfants. Je lui dit que c’était beaucoup pour son âge.
Il me répondit que pas du tout. Il me citait alors le cas de ses deux grands frères, Mohamed et Moussa, devenus martyrs lors de la dernière guerre. Il ne lui restait qu’un seul frère. C’est peu un seul frère, disait-il en me servant à nouveau du thé.
Il avait 4 fils, et il ne voulait pas qu’ils se retrouvent seuls quand un ou deux de ses enfants partiront martyrs. Il n’utilisait pas le conditionnel. Puis il me proposait qu’on aille visiter ensemble le centre de Gaza.
Les deux petits sont venus en courant, ils s’accrochaient à leur père en le suppliant de les ramener avec lui. Le père riait de les voir ainsi. Je lui demandais quel était leur prénom. Il se retourna alors et me fit face tout en me souriant. C’est vrai, c’était évident.
Mohamed et Moussa étaient déjà à l’extérieur, impatient, ils appelaient leur père qui tardait à sortir. Puis, on visita le centre de Gaza ensemble. Il n’y avait pas grand chose à voir.
Quand j’ai quitté Gaza pour ma prison dorée, j’ai pris conscience que le blocus n’est pas toujours là où on veut le croire.
Alors j’ai compris…
J’ai compris que l’oppresseur a toujours besoin de cultiver la peur et la haine pour justifier l’injustifiable. Il vit cerné dans sa propre peur et se nourrit de la haine qu’il propage. Avec les biens qu’il spolie, il construit les murs de sa propre prison.
J’ai compris que l’opprimé, lui par contre, n’a pas besoin de propager cette haine pour justifier sa résistance. Elle se justifie d’elle-même. C’est son acte de résistance qui le libère et le rend aussi digne.
Il est déjà libre, car sa victoire est déjà dans sa résistance.
Yamin
Carnets de Gaza-Palestine – mai 2012 :
Je suis rentré dans sa maison, ils nous avaient accueillis comme, ici, on sait accueillir les étrangers. Il était heureux de nous voir.
La journée, il travaillait et la nuit, parfois, il montait la garde sur la ligne de front, arme à la main. Il souriait quand il me racontait. Pas de haine, pas de colère, simplement sa vie.
Lors de la dernière agression un obus avait explosé tout près de lui. Toujours en souriant, il me racontait qu’il avait volé dans les airs. Il s’en est tiré avec une grave blessure au dos mais cela ne l’empêchait pas de continuer à participer à la résistance. Pas de ressentiment, pas de désir de vengeance, simplement sa vie.
Il avait vingt cinq ans, il en paraissait bien plus. Ses yeux brillaient de bonheur, son visage était lumineux quand il souriait. Il me dit alors qu’il avait cinq enfants. Je lui dit que c’était beaucoup pour son âge.
Il me répondit que pas du tout. Il me citait alors le cas de ses deux grands frères, Mohamed et Moussa, devenus martyrs lors de la dernière guerre. Il ne lui restait qu’un seul frère. C’est peu un seul frère, disait-il en me servant à nouveau du thé.
Il avait 4 fils, et il ne voulait pas qu’ils se retrouvent seuls quand un ou deux de ses enfants partiront martyrs. Il n’utilisait pas le conditionnel. Puis il me proposait qu’on aille visiter ensemble le centre de Gaza.
Les deux petits sont venus en courant, ils s’accrochaient à leur père en le suppliant de les ramener avec lui. Le père riait de les voir ainsi. Je lui demandais quel était leur prénom. Il se retourna alors et me fit face tout en me souriant. C’est vrai, c’était évident.
Mohamed et Moussa étaient déjà à l’extérieur, impatient, ils appelaient leur père qui tardait à sortir. Puis, on visita le centre de Gaza ensemble. Il n’y avait pas grand chose à voir.
Quand j’ai quitté Gaza pour ma prison dorée, j’ai pris conscience que le blocus n’est pas toujours là où on veut le croire.
Alors j’ai compris…
J’ai compris que l’oppresseur a toujours besoin de cultiver la peur et la haine pour justifier l’injustifiable. Il vit cerné dans sa propre peur et se nourrit de la haine qu’il propage. Avec les biens qu’il spolie, il construit les murs de sa propre prison.
J’ai compris que l’opprimé, lui par contre, n’a pas besoin de propager cette haine pour justifier sa résistance. Elle se justifie d’elle-même. C’est son acte de résistance qui le libère et le rend aussi digne.
Il est déjà libre, car sa victoire est déjà dans sa résistance.
Yamin