13/08: Hommage à Mahmoud Darwish

Le grand poète palestinien Mahmoud DARWISH est mort ce 9 août dernier.

Exilé,
il n’aura jamais pu retrouver son village Al-Birweh, rasé en
1948 par le colonialisme sioniste mais ses paroles de liberté
animent notre combat.
Le Collectif 69 de soutien au peuple palestinien vous propose de lui rendre d’hommage demain MERCREDI 13 AOUT de 18 heures à 19 heures

Place de la Comédie.

Ci dessous – en document joint, la version arabe -son poème : désormais, tu es un autre et la déclaration de Hind Koury , Déléguée Générale de la Palestine en France.


désormais, tu es un autre

Nous fallait-il choir d’un lieu aussi élevé, nous fallait-il voir notre sang sur nos propres mains pour admettre que nous ne sommes pas des anges, comme nous l’avons longtemps cru ?

Nous fallait-il exhiber nos parties intimes en public pour que notre vérité cesse d’être vierge ?

Quels menteurs nous étions lorsque nous avions affirmé : Nous sommes l’exception !

Être crédule vis-à-vis de soi est pire que de mentir aux autres !

Être aimables envers ceux qui nous haïssent et cruels envers ceux qui nous aiment n’est que bassesse de l’arrogant, suffisance du médiocre !

O Passé ne nous transforme pas chaque fois que nous nous éloignons de toi !

O Futur ne nous demande pas : Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ? Car nous l’ignorons nous-mêmes.

O Présent supporte-nous encore quelque temps, car nous ne sommes que des passants bien lourdauds !

L’identité, c’est ce que nous léguons, non ce que nous héritons, c’est ce que nous inventons, non ce dont nous nous souvenons.
L’identité, c’est le miroir corrompu que nous devons briser chaque fois que l’image nous plaît !

Cagoulé et armé de bravoure, il a assassiné sa mère parce qu’elle était la bonne proie à sa portée et parce que la soldate qui l’avait arrêté avait dénudé ses seins en disant : Ta mère en a-t-elle de pareils ?

N’était-ce la honte et l’obscurité, je serais allé à Gaza, sans connaître ni le chemin vers la maison du nouvel Abu Sufiân ni le nom du nouveau prophète !

Si Mahomet n’était pas le dernier des prophètes, toute clique aurait eu son prophète et tout Compagnon aurait eu sa milice !

Juin nous a séduit lors de son quarantième anniversaire. Si nous ne trouvons pas qui nous vaincra de nouveau, nous nous vaincrons nous-même, de nos propres mains, pour ne pas oublier !

Tu fixeras longtemps mes yeux, mais tu n’y trouveras pas mon regard. Il a été dérobé par un scandale !

Mon cœur ne m’appartient pas, il n’appartient à personne. Il est indépendant de moi, mais il n’est pas devenu une pierre pour autant.

Sait-il, celui qui clame « Dieu est Grand ! » au-dessus du cadavre de sa victime/son frère, qu’il n’est qu’un mécréant ? Il voit Dieu à son image : bien moins qu’un être humain normalement constitué.
Le prisonnier qui aspire à hériter de la prison dissimule un sourire de victoire devant la caméra, mais il ne réussit pas à dompter le flux du bonheur qui s’écoule de ses yeux, car le texte hâtif est peut-être plus puissant que le comédien.
Qu’avons-nous besoin de narcisses puisque nous sommes des Palestiniens !

Et puisque nous ignorons la différence entre la mosquée et l’université, termes dérivés de la même racine linguistique, quel besoin avons-nous d’un État qui s’achemine vers le même destin que les jours ?

A la porte d’une boîte de nuit, la pancarte dit : Bienvenue aux Palestiniens qui reviennent du champ de bataille. Entrée gratuite. Notre vin ne vous soûlera pas.

Je ne peux pas défendre mon droit de travailler comme cireur de chaussures sur le trottoir, car les clients auront le droit de me prendre pour un voleur de chaussures – c’est ce qu’un professeur d’université m’a dit.

« L’étranger et moi contre mon cousin, mon cousin et moi contre mon frère, mon guide religieux et moi contre moi-même. ». Voici la leçon numéro 1 du nouvel enseignement d’instruction civique, donnée dans les caves de l’obscurité.


Paris,
le 11/08/2008

DECLARATION SUITE AU DECES DE MAHMOUD DARWICH

En ce jour bien sombre de l’histoire de la Palestine, je tiens à
exprimer notre profonde douleur et notre immense tristesse pour la
perte de la légende de tout un peuple, pilier de la littérature
palestinienne, et bien au-delà phare de la littérature mondiale
contemporaine : Mahmoud Darwich, lauréat
du prix Prince Claus pour «son œuvre impressionnante», chevalier des Arts et des Lettres (en France), nous a quitté ce samedi 9 août
2008 à la suite d’une troisième intervention chirurgicale.

Né le 13 mars 1941 à Al-Birweh, en Galilée, Mahmoud Darwich, porte-parole de la tragédie palestinienne, restera la voix de la misère des enfants aux pieds nus de nos camps de refugiés, l’odeur de notre terre perdue, de ses oliviers, ses fleures d’amandiers, de son café et de son pain. Il fut le chant des oiseaux migrateurs qui attendent éternellement le retour. Il fut la mémoire des batailles, des bateaux qui emmenaient notre cause de port en port. Il fut le passeport de notre identité palestinienne, et l’expression de la douleur de l’homme opprimé, là où il se trouve… Mais il incarna aussi le souffle d’espoir qui fleurissait nos printemps et bénissait nos nouveau-nés.

Mahmoud, qui chantera ta disparition aujourd’hui, toi, qui était le seul poète sachant exprimer une telle douleur ? Tu restes à tout jamais dans nos cœurs, ton œuvre et ton nom sont gravés pour l’éternité au panthéon des grands poètes de ce monde.

Pour le peuple palestinien, ton départ est insurmontable. En ces temps d’incertitudes, nous avions tellement besoin de ta voix pour nous soutenir et nous rassurer, parfois pour nous révéler à nous même. Nous avons encore tellement besoin de ton message de paix pour réveiller la conscience de ce monde comme qui trop souvent ferme les yeux et fait la sourde oreille aux cris de nos victimes meurtries.

Mahmoud, tes vers sont immortels comme l’était ton combat. De ton paradis, tu continueras à chanter, car il n’y a plus de frontières pour ton âme là où tu vas. On se retrouvera peut être un jour en paix sur les sommets du Carmel qui ont vu ton enfance.

Héritiers de ta mémoire, il nous appartient maintenant de déclamer tes rimes, et de te promettre de continuer de porter haut ton combat pour la justice et pour l’Homme… Adieu le dernier de nos frères, de nos amis, de nos amours… Adieu la voix de la Palestine !

Hind Khoury,Déléguée Générale de la Palestine en France

Un deuil national de
trois jours a été décrété par le président Mahmoud Abbas. La Délégation
Générale de Palestine en France vous ouvre donc ses portes de 10 heures
à 11 heures et de 15 heures à 16 heures à partir de ce
mardi. Un registre de condoléances est mis à votre disposition.