Avril 2009 dans le village d’Hares
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Avril 2009

J’ ai rejoint pour un mois l’association IWPS  » International Women peace Service »
Nous sommes dans un logement dans le village d’Hares, dans le district de Salfit, a 60 km de Ramallah, l’association y est installée depuis 2002.
Actuellement nous sommes quatre volontaires, certaines passent deux ou trios mois.
Pour moi c’est la première fois que je partage ainsi de façon plus proche la réalité de l’occupation palestinienne.

Nous sommes proches de colonies israéliennes importantes comme celle d’ Ariel (25 000 habitants), et d’autres plus petites.
Cela semble avoir une incidence forte sur la présence de l’armée et des incursions régulières dans ces divers villages, des arrestations , des couvre feu, créant un climat d’insécurité sur la population.

A Hares on note une augmentation de ces interventions.

Notre rôle est identique a celui d’une organisation plus connue ISM. Etre présent en territoire occupé pour observer, témoigner de ce que nous voyons, soutenir aussi les actions non violentes des palestiniens, étant bien entendu que nous n’intervenons qu’a leur demande.

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Incursions de l’ armee a hares

avril 2009

Hares fait l’ objet d incursions fréquentes par l’ armée particulièrement depuis deux mois . Hares est situe a proximité de colonies dont Ariel qui est une des plus grandes. Hares se retrouve au bord de voie express faite pour les israéliens et que peu de palestiniens sont autorises a utiliser; des grillages ferment l’accès entre la voie express et le village.
Une seule voie d’accès au village en voiture est actuellement ouverte, les autres sont fermées par des road blocks ( terre et grosses pierres).

Le jeudi avant mon arrivée le 26 mars, l’armée est entrée en pleine nuit, a fait sortir 150 hommes en majorité des mineurs; ils ont été rassembles dans l’école; raison qui leur était avancée; actualisation des situations de chacun. Il ont déclaré le village en ‘closed military zone’ . Quatre jeunes ont été arrêtes, menotés, bandeau sur les yeux; quelques témoignages de violence physique; la croix rouge a été appelée, ils ont refuse de la faire entrer prétextant que c’ était a eux les militaires de s’ en occuper, mais ils n’ ont rien fait pour ces blesses qui le lendemain ont du aller a l’hôpital.
L’école n’a pas pu avoir lieu, et des objets ont été cassés. Ils sont entrés dans quatre maisons, ont renverse les meubles, détruit, pour le plaisir ( coup de couteux dans les canapés, tableaux d’ ancêtres casses… sans arrêter personne dans ces maisons.

Sur les quatre arrêtes, un seul a été relâché (trois sont toujours détenus en date du 10 avril)
Le rôle de notre association a été d’être présent le plus possible pendant le déroulement des opérations, d’observer, de photographier. Dans les heures et les jours qui ont suivi de compléter auprès des habitants toutes informations qu’ils avaient, d’en informer des partenaires, mais aussi de voir, avec les familles de personnes arrêtées ou ayant subi des préjudices, l’aide qu’on pouvait leur apporter( mise en contact, recherche d’informations..)

Le 1 avril vers 21 h nous avons été informés par téléphone par un habitant que l’armée était la avec des jeeps et des soldats a pied, annonçant par haut parleur un couvre feu pour toute la nuit; ils disaient qu’ils allaient jeter des bombes ( des gaz, ou des grenades assourdissantes) dans les rues. Ca s’ est calme vers 22h, ils semblaient être repartis.

Notre rôle: une de nous est restée a la maison pour prévenir par téléphone les contacts importants, deux sont allées chez l’habitant qui nous avait informe et qui est un ami; nous avons pu assister au manège des soldats devant sa maison; une heure plus tard le calme semblant revenu nous sommes rentres , restant joignables a tout moment.

Au matin l’armée n’ avait pas juge bon d’informer les habitants de la levée du couvre feu, nous avons du aller a l’information auprès de l’autorité palestinienne.

Il nous est aussi rapporté et nous devons essayer de l’observer nous même, qu’il y a souvent des incursions de l’armée pendant les heures d’école ou a la sortie, ils se mettent en face de l’école et ce ne peut être qu’une provocation; les parents sont inquiets, un enfant pourrait lancer des pierres, c’est alors la prison pour trois mois.

Quelle est la raison de ces incursions fréquentes et plus ou moins dures ? la raison avancée par les soldats est toujours des jets de pierre ou des « coktails molotov » sur la route. Vrai , faux ? ce qui est inacceptable pour les habitants c’est cette forme de punition collective, les moyens disproportionnes qui sont pris pour arrêter des personnes si des personnes sont responsables; il nous est dit qu’ils ont bien les moyens de savoir qui sont les auteurs si auteurs il y a. En tout cas ils créent un climat de terreur, ils mettent les habitants en insécurité, difficile nous dit-on de dormir dans ces conditions.

Journée du 8 avril 2009

Une journée dense, riche, beaucoup d’émotions aussi

Salfit
Nous étions a Salfit le matin, Salfit est une sorte de chef lieu de district, dont dépend notre village de Hares.

Rendez vous avec une personne dont le rôle est d’être Médiateur entre palestiniens et israéliens, mais rendez vous annule et reporte au lendemain.

Nous en profitons pour nous balader et nous aprenons qu’il se déroule une fête organisée par le centre de la culture arabe qui est base a Jérusalem Est, mais qui se déplace dans les villages de Cisjordanie ( la Cisjordanie étant coupée de Jérusalem) . Avant de nous y rendre , en nous promenant dans le vieux quartier, nous sommes interpellées par une femme qui nous invite chez elle ( ce qui se produit tout le temps), et une voisine se joint; sa maison est très ancienne, elle nous la fait visiter.

Moment très sympathique comme toujours autour du thé , du pain trempe dans l’huile d’olive ( la leur). Nous découvrons l’émigration des palestiniens avec le Venezuela, la voisine y a passé 25 ans, elle est revenue a l’age de 45 ans et elle nous raconte (en espagnol) les difficultés qu’elle a eues a reprendre les coutumes vestimentaires culturelles/religieuses du monde arabe.

Moment très chaleureux aussi le temps que nous passons dans cette fête, beaucoup de monde, les collégiens sont la aussi avec leur uniforme; discours politiques sur la résistance palestinienne, des orateurs très brillants, des musiciens , des chanteurs, des danseurs hommes et femmes en costume traditionnel ( il émane de leur danse , de leur maintien corporel, une très grande beauté, une très grande force, beaucoup de noblesse et d’énergie), petit stand sur la campagne de boycott des produits israéliens, avec des produits exposes ( n’ oubliez pas cette campagne !), pour les palestiniens c’est plus difficile que pour nous, ils dépendent tellement d’ Israël qui revend le plus souvent leurs productions.

Marda
Nous quittons cette fête avec regret, pour un rendez vous avec un maire dans un village du district . IWPS étant la seule organisation internationale du district, nous sommes charges, quand nous en avons le temps, d’ actualiser diverses informations sur les villages et de les réactualiser, cela pour un service représentant les nations unies (évolution de la population, activités, vie associative, école, constructions, accès, difficultés avec les colonies voisines..etc); nous en profitions aussi dans ces rencontres pour reparler de notre organisme et des liens que nous pouvons avoir, du soutien que nous pouvons apporter si ils le souhaitent. Ces rencontres sont très intéressantes. Nous interrogeons actuellement des villages qui comme Hares, sont proches des fameuses colonies (settlements) je ne sais plus comment on dit en français ( implantations illégales.!.) Sans rentrer dans tout le détail, ces colonies c’est un sujet énorme, c’est la source des plus gros problèmes qui nous sont cités ( en plus bien sur des problèmes de base de tous les palestiniens (se déplacer, travailler, construire,…vivre en liberté tout simplement).

La présence de ces colonies,ce sont bien sur les terres qui leur sont prises( 50, 70 % ) pour les villages que nous avons vus, ce sont des routes nouvelles crées pour les israéliens qui prennent encore des terres et ne sont pas toujours utilisables par les palestiniens, des accès plus difficiles a leur village, ( si il y avait trois accès par exemple, deux sont bouches par des blocs de pierre et de terre, le troisième a une barrière que l’armée peut donc décider de fermer), les terres bien sur qui leur sont prises, des barrières électroniques autour des routes , autour des colonies, des difficultés a se déplacer , a ne plus pouvoir parfois aller dans leurs terres, les miradors le long des ces barrières qui sont l’équivalent du Mur en campagne, des miradors qui observent tout ce qui se passe dans le village, des incursions régulières de l’armée, tous le jours pour certains villages, avec intrusions dans des maisons,arrestations, …des agressions aussi des colons souvent armes; dans les deux villages que nous venons de voir dans l’un, un enfant est a l’hôpital depuis deux mois , dans l’autre il y a eu un enfant renversé volontairement par une voiture il est mort, des agressions quand ils travaillent dans leurs terres.

Un des gros problèmes également de la Cisjordanie, c’est la difficulté de construire pour ces habitants des divers villages; si le Cœur du village est en zone B(administration mixte Israël/Palestine, très vite c’est la zone C ou c’est totalement de l’administration israélienne et en général c’est refuse ( nous avons vu plusieurs villages ou des maisons ont été construites sans autorisation d’Israël, et elles doivent être démolies).

Les internationaux (c’ est ainsi qu’on nous appelle) sont très demandes pour la récolte des olives en octobre novembre mais aussi a divers moment de l’année pour certaines tâches dans les oliviers, leur présence est en général une protection, elle évite l’escalade dans la violence de la part des colons et elle permet aux palestiniens de poursuivre leur travail.

Marda par exemple est un très beau village de 2000 habitants a flanc de colline, entouré de vergers d’olivier, mais qui se retrouve coincé entre la nouvelle route pour les israéliens et la colonie d’Ariel (25000 habitants) qui les surplombe tout le long de la crête au dessus. Entre les deux bien sûr il y a barrière électronique, rouleaux de barbelés, miradors…

Retour vers 20h a Hares, il fait nuit, l’armée est a l’entrée du village
Nous décidons rapidement de la stratégie pour être à l’unisson.
Ils sont une dizaine de soldats, quatre palestiniens sont alignes en attente d’ être libérés, trois autres sont en train d’être fouilles, bagages , voiture..

R. une des volontaires est allemande , elle a 21 ans ,elle parle l’hébreu après un séjour d’un an l’an dernier avec une association en Israël s’occupant de personnes handicapées, on décide qu’elle s’adressera en hébreu a un soldat pour savoir ce qui s’est passé, pourquoi ces hommes attendant et ne rentrent pas chez eux, si il y a eu des arrestations; la réponse du soldat est toujours la même, nous sommes la parce qu’il y a des gens qui lancent des pierres et des cocktails « molotov » sur la route, si vous entrez dans ce village c’est très dangereux…après avoir accepte que nous restions la, il nous demande de partir et si nous ne partons pas les personnes ne seront libérées que le matin; nous nous adressons aux palestiniens et leur demandons ce qu’ils en pensent, ils préfèrent que nous partions; quelques instants après nous nous retournons , l’opération est terminée, les hommes rentrent chez eux.

Le soir nous parlons de cette opération avec notre voisin du dessous, qui est un ami.
Ce qui est condamnable dit-il c’est la punition collective, si quelqu’un lance des pierres, ils ont tous les moyens de savoir qui c’est et de l’arrêter(un véritable mirador est au bord de la route face au village), mais ils préfèrent faire ces opérations massives ( comme celle ou il y a dix jours ils ont rassembles en pleine nuit 150 hommes du village et les ont gardes 16 heures) pour créer un climat de tension chez les palestiniens, provoquer des réactions de leur part et justifier ainsi la construction du mur (des grillages et barbelés en campagne) , perpétrer l’image des palestiniens terroristes.

Ce voisin qui a voulu que IWPS s’installe dans l’appartement au dessus de chez lui (il est propriétaire) nous reparle de notre présence auprès des palestiniens dans ces moments de confrontation avec l’armée; en général cela permet que les soldats se contrôlent , car ils savent que nous photographions, que nous faisons des rapports, cela évite l’escalade.

Notre voisin nous accueille chez lui a notre retour a la maison , un échange très émouvant
il nous parle ensuite de leur histoire personnelle et nous fait part de ses réflexions.
Cet homme a un visage toujours assez grave..il a passé treize ans en prison et son fils ainé vient d’en passer cinq,( il devrait sortir en mai), son frère a reçu des tirs il est paralyse a vie , ce couple a deux autres jeunes enfants.

Emprisonné pour son appartenance a un groupe politique de résistance, son fils avait un an quand cela s’est passé, il l’a vu grandir a travers des barreaux (il nous raconte comment un jour il a parlé a un soldat israélien pour le mettre en face des conséquences de ces actes); son fils s’est retrouve adolescent en ville a Naplouse a un moment en 2004 ou l’occupation militaire était forte aussi en ville, il a rejoint des groupes politiques et s’est retrouve arrêté….

La vie en prison est plus difficile aujourd’hui, plus de répression, visites très limitées , (seule sa mère peut le voir une fois par mois , lui n’a pas le droit il ne l’a pas vu depuis cinq ans).

Il parle de la jeunesse de ces soldats qui ne font qu’appliquer des ordres, qui n’ont pas encore développé de conscience de ce qu’ils font. Parfois il lui arrive de leur parler, il arrive alors qu’en l’écoutant ,ils se fassent tout petit comme une souris qui cherche a sortir par un trou, dit-il.

Parlant de la violence qu’ils peuvent ressentir, il dit ; quand la vie ressemble a la mort, qu’il n’y a plus de liberté, perdre sa vie n’est plus important…
Je souhaite des jours meilleurs pour eux et pour nous..

Pour la suite du récit de 14, 20 et 26 avril 2009 lire la pièce jointe